Émilie Capliez veut résumer « l’humanité toute entière » en un seul souffle scénique : malaise enthousiaste dans le monde du théâtre
Un projet qui ne manque pas d’air
C’est lors d’une conférence de presse tenue dans une salle volontairement non chauffée du Théâtre National Populaire que la metteuse en scène Émilie Capliez, déjà connue pour son projet de mise en scène du silence, a levé le voile sur sa nouvelle création : condenser « l’essence de l’humanité » en un seul souffle théâtral. Oui, un seul souffle. Littéralement.
« Je veux qu’en un expir, le public ressente la totalité de ce que signifie être humain : l’amour, la peur, le sandwich jambon-beurre mangé debout dans une vie trop courte… », a déclaré Capliez, les yeux brillants de conviction (ou d’allergie aux projecteurs éco-responsables éclairant la scène).
Une performance inédite… de 3,2 secondes
Baptisé « AnthropoExhale », le spectacle, annoncé comme « une expérience à la frontière du visible et du respirable », durera précisément 3,2 secondes. Sur scène : un unique comédien vêtu d’un tissu biodégradable, exhalant profondément face au public. Derrière lui, une lumière verte s’allume. Puis s’éteint. Fin.
« C’est tout ? », a demandé un journaliste. « Non. C’est plus que tout », a répondu Capliez, citant Heidegger, mais seulement de mémoire, car « Google ne peut pas comprendre l’Être ».
Une division chez les experts, un effondrement chez les critiques
La communauté théâtrale peine à trancher entre visionnaire géniale et performance d’asphyxie culturelle. « C’est une claque métaphysique… un souffle qui dit l’indicible », s’enthousiasme Clément Prozat, critique à la revue Le Rideau du Sens. À l’inverse, la critique indépendante Sylvie Ventoux confesse : « J’ai éternué pile à ce moment-là. Je ne suis pas sûre d’avoir tout ressenti. Ou alors j’ai tout raté. Ou j’ai tout compris, je ne sais pas. »
Le public aussi reste partagé… quand il comprend qu’il était arrivé
Lors d’avant-premières discrètes à Saint-Étienne, certains spectateurs ont admis ne pas avoir compris que le spectacle avait commencé, ni qu’il était terminé. Plusieurs pensaient se trouver dans un exercice de relaxation respiratoire collectif. « J’ai attendu que quelqu’un monte sur scène. Puis j’ai attendu que quelqu’un descende. Puis on nous a évacués », confie un spectateur perdu mais poli.
Financé par huit subventions régionales au nom de l’intangible
Le projet a reçu le soutien de plusieurs institutions, séduites par son « minimalisme écologique », sa « puissante économie dramaturgique » ainsi que par le fait qu’il ne nécessite qu’un seul comédien, une caisse de thym frais et qu’il tienne sur une clef USB. On murmure même qu’il pourrait concourir à une prochaine Biennale de l’Invisible.
Interrogée sur ses projets futurs, Capliez évoque « un retour au silence intégral, mais cette fois joué sous-marin » : un projet qu’elle appelle « L’hommard ».
Conclusion : l’humanité sur un souffle, et puis s’en va
Qu’on l’admire ou qu’on suffoque devant tant de concept, Émilie Capliez rappelle que le théâtre contemporain est capable d’explorer les limites… même celles du diaphragme. Quant au public, il est invité à venir respirer — ou retenir sa respiration — dès l’hiver prochain, dans ce qui promet d’être la pièce la plus courte… et peut-être la plus dense… du siècle.





