Marseille : le quartier de Belsunce inaugure le premier système de prise de rendez-vous pour dealers via Doctolib
C’est une petite révolution logistique dans les rues de Marseille : face à l’ »affluence commerciale non déclarée » qui anime quotidiennement le quartier de Belsunce, la mairie a décidé de prendre le problème à bras-le-corps — en s’inspirant directement du système médical. Depuis le début du mois, toute activité de deal est soumise à une prise de rendez-vous obligatoire sur Doctolib, avec créneaux horaires limités, numéros de file virtuelle et QR codes générés à chaque transaction. Un projet-pilote présenté comme « une avancée dans la fluidification urbaine ».
« Il fallait organiser le flux illégal. Le chaos, c’est très 2010 », se félicite Josiane Bernoux, adjointe en charge des solutions innovantes et des hauts-parleurs municipaux. « Depuis qu’on a synchronisé les créneaux de deal avec les horaires de la poste du cours Belsunce, les nuisances sonores ont baissé de 12 décibels et les clients se comportent presque comme dans une pharmacie de quartier. »
Des files d’attente numérotées et un système de notation 5 étoiles pour les clients ponctuels
Concrètement, le système baptisé « DoctoDeal » permet à chaque intervenant du micro-commerce urbain de réserver une plage de 45 minutes dans un périmètre défini par GPS. Toute absence injustifiée entraîne un bannissement temporaire de la plateforme (et un message passif-agressif signé « La modération vous observe »). Les clients, quant à eux, peuvent noter leur transaction sur cinq étoiles et laisser un commentaire du type : « Très pro, arrive avec de la monnaie. Je recommande. »
Interrogé sur ce protocole ubuesque, le professeur Jean-Michel Frémieur, docteur en socio-logistique à l’Université de Strasbourg, applaudit l’initiative : « Nous avons volontairement renoncé à l’utopie de l’éradication. Le véritable progrès, c’est de produire du trafic organisé, avec des plages horaires creuses, des plages horaires pleines, une dynamique de créneaux — comme dans une piscine municipale. »
Un ratage au lancement : “désolé, aucun créneau disponible avant jeudi prochain”
Quelques ajustements restent cependant à opérer. Lors de la première semaine, le site a été temporairement saturé par une demande exceptionnelle dans la rue Thubaneau. « C’est simple, tout est plein comme chez l’ophtalmo », soupire Mehdi*, dealer intermittent et désormais auto-entrepreneur. « J’ai dû faire six files d’attente, pour au final apprendre qu’un gars avait piraté mon créneau de 14h15. Inadmissible. Je vais porter plainte auprès de l’Agence du deal numérique. »
En parallèle de la régulation horaire, la mairie envisage une évolution du modèle avec l’introduction du « click & collect » ainsi qu’une appli de reconnaissance vocale baptisée « Alexa, où est mon client du 16h45 ? ». Des associations craignent une normalisation excessive, notamment depuis l’ajout d’une fonction de téléconsultation où l’on peut évaluer son besoin en fonction du niveau de stress de la journée.
« Ne soyons pas naïfs : ce trafic existera, autant lui coller un mot de passe »
Face aux critiques sur la moralité de la démarche, le maire tente la carte de la realpolitik. « La politique de l’autruche, c’est terminé. Si l’État ne veut pas légaliser, nous au moins on rationalise. À défaut de salle de shoot, on a une salle d’attente virtuelle, c’est toujours mieux que le trottoir. »
À la question de savoir si cette expérimentation sera étendue à d’autres villes en tension, la maire de Paris aurait déjà évoqué un partenariat avec Blablacar Cité pour coordonner les déplacements interquartiers des acteurs du secteur.
En tout cas, les riverains sont partagés : certains saluent la baisse des nuisances, d’autres regrettent le « petit folklore spontané du commerce parallèle ». Mais tous s’accordent sur une chose : c’est la première fois qu’un dealer leur dit « Excusez-moi, j’ai rendez-vous à 15h12, je suis déjà en retard… »
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*le prénom a été modifié, mais lui aussi a un profil Doctolib complet.